Fier d'être français?

Rappel du premier message :

Je voulais vous demander si vous vous sentiez fière d'être français?
Pour ma part je me sens française. J'ai vécu à l'étranger: en Afrique noire et arabe et en Angleterre, et j'ai constaté que je ne me sentais totalement chez moi en France. Il y a des choses liées à la France dans lesquelles je me reconnais et qui sont capitales pour moi, et je pense que l'importance que je leur prête est due, notamment, au pays dans lequel j'ai grandi: par exemple l'importance donnée à la culture, à la solidarité, à la nourriture, à la laïcité etc.
Pour autant je ne me sens pas réellement fière d'être française. Le terme de fierté me dérange d'être manière générale. Je suis attachée à la France, j'assume entièrement ma nationalité, mais je ne considère pas qu'elle soit meilleure qu'une autre. Je n'aime pas beaucoup les drapeaux et je ne me sens pas concernée par la ferveur nationaliste.
Je suis ce que certains appellent une française "de souche" (pour moi ça ne veut trop rien dire), dans le sens où on peut remonter mon arbre généalogique jusqu'au 15è siècle en ne trouvant que des français, mais je ne me sens pas moins française que des enfants d'immigrés. D'ailleurs, dans mon entourage, la personne qui est la plus véhémente dans son "amour pour la France" est un garçon algérien d'origine, qui est arrivé en France à 10 ans en tant que demandeur d'asile.
Et vous? Vous sentez vous fière/fier de votre nationalité? Est-ce que le patriotisme vous parle?

Non, je ne suis pas fière d'être française, je ne vois pas pourquoi je le serai.
Je suis née avec la nationalité française, ce n'est pas quelque chose que j'ai mérité, ça m'est tombée dessus.
Je peux être fière d'avoir réussi mes études, par exemple.
Mais d'être française, non.

Difficile à répondre.
Je viens d'une famille ultra patriote: du côté de ma mère, il s'agissait de Lorrains qui avaient fui la Lorraine pour échapper à l'annexion allemande, et rester français. Par la suite, certains des membres de la famille sont morts en camps de concentration pour faits de résistance. Donc, chez nous, on aimait le général de Gaulle, on connaît "Vous n'aurez pas l'Alsace et la Lorraine", et on connaît la Marseillaise. C'était aussi couplé, soyons honnêtes, à un très fort sentiment anti-"boche": mon arrière grand tante, ancienne déportée à Ravensbrück, épluchait les produits pour éviter tous ceux qui venaient d'Allemagne. D'un autre côté, le paysage lugubre de ces ossuaires et de ces cimetières franco-américains ou franco-allemands faisait bien sentir à tout le monde que ces guerres avaient surtout été un désastre pour tout le monde. Personnellement, j'ai assez rapidement rejeté ce patriotisme vraiment cocardier, et pense avoir oeuvré pour la réconciliation franco-allemande avec mon frère en conduisant mes grand-parents à aller en Allemagne. Et finalement, quelle surprise, ils ne sentaient pas si mal que ça, loin de là, en Forêt-Noire (c'était magique cette fois où ma grand-mère tout naturellement demande "une bière pression" directement en français à un serveur, tellement elle se sentait chez elle)
Mon père est arrivé en France il y a bientôt 40 ans: en bref, il a passé plus de temps en France qu'en Afrique. Ce n'est pas spécialement un nationaliste, mais il nous a toujours élevés dans le respect de la France.

En ce qui me concerne, je suis hermétique aux effusions patriotiques exacerbées: ce n'est pas spécialement mon truc d'accrocher le drapeau français à ma fenêtre et de brailler la Marseillaise. J'ai vécu un peu de temps en Allemagne, et j'ai connu bien entendu ce sentiment de repli identitaire naturel quand on vit à l'étranger. Mais il n'a pas perduré: même si les Allemands et les Français ne sont pas semblables, nous avons quand même beaucoup de choses en commun (et ce, d'autant plus que bon en soi, la Picardie et la Lorraine, berceau de ma famille maternelle, c'est pas non plus très éloigné culturellement de l'Allemagne. Et ça vaut aussi pour nos amis Belges)
Et je connais suffisamment l'histoire pour savoir que les constructions de certaines frontières sont complètement conjoncturelles et ne tiennent pas compte forcément de la réalité des peuples: perso, je ne vois pas la différence entre un Ardennais et un Wallon.

Je ne suis pas fière des valeurs de la France à proprement parler: ce que l'on désigne par cela, ce sont les valeurs de la Révolution française et de la République, qui sont à ma connaissance, communes à l'ensemble des pays d'Europe aujourd'hui (à part la laïcité, qui est une notion très française). Je ne suis pas bisounours, et je sais en revanche très bien que notre histoire comprend beaucoup de zones d'ombre, donc je refuse ces tentations manichéennes.
En bref, je suis une citoyenne française, je parle français et je connais l'histoire de mon pays. Et je suis heureuse de vivre dans un pays démocratique et libre. Je suis de culture française, et je le vis bien. Mais je suis aussi européenne, tant nos différences ne justifient pas à mes yeux un nationalisme reclus sur lui-même, et tant nos peuples sont au fond très proches.
Spécial toast à Sarah si elle passe par ici et à nos cousins allemands

la laicité est une valeur très française mais elle est bien malmenée...

Elle est malmenée parce que d'un côté on vire aux penchants laïcards anti-religieux et de l'autre, on est parfois trop coulants.
Il est normal d'empêcher des femmes d'être voilées quand elles représentent le service public ou autres. D'un autre, il est stupide de les empêcher d'être voilées quand elles sont dans la rue (je ne parle pas de burqa hein), puisque c'est leur affaire, même si ça ne m'inspire pas à première vue.
Et je commence à être soûlée qu'on parle systématiquement des musulmans alors que personne ne dit rien quand des cathos intégristes essaient de bloquer des cliniques ou hôpitaux qui pratiquent l'IVG. Qu'on montre du doigt les écoles confessionnelles musulmanes quand les cathos et les juifs ont également leurs écoles avec parfois des enseignements très limite (je pense à une école catho hors contrat qui critiquait sans cesse la République dans ses locaux, etc...)
La laïcité, c'est difficile, ça demande d'abord et avant tout de la tolérance pour autrui. Ce qui n'est pas le cas quand j'entends des gens dire que l'islam est incompatible avec la République. On a réussi à faire la paix avec une bonne partie de la communauté catholique (avec des retombées positives pour l'Eglise, d'ailleurs, quand je vois l'apport des théologiens français à la doctrine de l'Eglise) je ne vois pas pourquoi on n'y arriverait pas avec les musulmans.